Pourquoi ce blog ?

Nous refusons de croire ce que nous savons…

La compensation carbone des voyages pose les questions de la durabilité des modèles du tourisme d’aujourd’hui :

> Peut-on réduire la quadrature du cercle, celle d'un nombre croissant de voyageurs en avion, d'un stock fini de pétrole, et d'une technologie encore inexistante, même embryonnaire, pour faire voler des avions avec autre chose que du kérosène ?
> La compensation pratiquée à ce jour induit-elle une nouvelle forme de colonialisme ?
> Quelle spéculation lègue t-elle aux générations futures ?

De vraies questions qui appellent de vraies solutions. Le tourisme, et pas seulement le transport aérien, devront subir, ou organiser leurs mutations.

Ces questions sont à peine abordées, en général, dans les articles consacrés au sujet.
Vous en trouverez sur ce blog une sélection, pour vous faire votre propre idée.

Voyageur, si ces propos te dépriment, tu peux te balader sur mes diaporamas ci-dessous...

vendredi 16 septembre 2011

En pleine tourmente financière, les banques se ruent sur les forêts et le carbone

 
15 septembre 2011,
Par Sylvain Angerand

En préparation des négociations sur le climat qui auront lieu en fin d’année à Durban (Afrique du Sud), et en pleine tourmente financière, le secteur banquier, avec en tête BNP Paribas [1], lance une offensive pour réclamer l’intégration des forêts dans le marché du carbone. Les Amis de la Terre s’opposent fermement à cette dérive qui ne repose sur aucune base scientifique et place l’avenir des forêts du monde, et des communautés qui en dépendent, dans les mains d’entreprises irresponsables.
Le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et le secteur bancaire publient aujourd’hui un nouveau rapport[2], avec une série de recommandations, pour que les négociations sur la lutte contre la déforestation et le réchauffement climatique « s’ouvre efficacement aux flux de la finance privée[3]  ». Au centre des débats, les banques espèrent pouvoir accéder à un marché potentiel de plusieurs dizaines de milliards d’euros par an[4] avec la création de crédits-carbone forestiers REDD[5] qui pourraient être achetés par les entreprises et les États ne respectant pas leurs obligations de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Or, comme l’explique Sylvain Angerand, chargé de campagne pour les Amis de la Terre et ingénieur forestier, la compensation carbone est une imposture scientifique : « Il n’est pas possible de compenser la libération de carbone d’origine fossile (pétrole, charbon...), qui s’est formé pendant plusieurs millions d’années, par un stockage très temporaire dans les forêts. Les grands incendies en Amazonie, en Russie ou en Asie du Sud-Est, qui se multiplient chaque année, nous le rappellent de façon évidente ».
En réalité, l’enjeu pour le secteur privé n’est pas tant de participer à la lutte contre les changements climatiques que de transformer la crise écologique en opportunité économique comme l’explique Yann Louvel, référent de la campagne Responsabilité des acteurs financiers pour les Amis de la Terre : «  Si BNP Paribas, et les autres banques qui ont co-signé ce rapport, voulaient vraiment s’engager pour le climat elles arrêteraient de financer d’une part des secteurs qui contribuent à la déforestation comme les monocultures de palmiers à huile ou de soja[6] et d’autre part des projets extrêmement controversés de centrales à charbon ou d’extraction de pétrole à partir de sables bitumineux[7]. »
Alors que le secteur financier s’écroule, les banques sont à la recherche de nouveaux placements présentés comme beaucoup plus sûrs et plus rentables : c’est ce qui explique la tendance croissante à la financiarisation des ressources naturelles et des biens communs comme l’atmosphère. Après la conférence de Durban en décembre, c’est le Sommet de Rio en juin qui est en ligne de mire des banques : « Les offensives du secteur financier pour mettre la main sur l’atmosphère et la biosphère se multiplient et il est urgent de s’y opposer car les conséquences écologiques et sociales sont désastreuses » comme l’explique Sylvain Angerand qui poursuit : « Nous observons de très près les projets pilotes et nous constatons de graves dérives : restriction d’accès, expulsion de communautés pour planter des arbres transgéniques à croissance rapide, ou encore, embauche de milices privées pour protéger les investissements de ces entreprises[8] ».
Les Amis de la Terre appellent donc les banques privées, et en particulier BNP Paribas, à faire face à leurs responsabilités en arrêtant de financer des projets qui contribuent à la déforestation et au dérèglement du climat plutôt que de vouloir en tirer doublement profit en jouant au pompier-pyromane.


[1] Christian del Valle, Directeur des Marchés de l’Environnement pour BNP Paribas, est l’un des deux intervenants du secteur bancaire pour la conférence de sortie du rapport ci-dessous.
[2] REDDy-Set-Grow : Part II - Recommendations for International Climate Change Negotiators. Voir ici : http://www.unepfi.org/events/2011/f...
[3] Communiqué de presse de UNEP-Finance Initiative du 13 septembre 2011. « United Nations-convened coalition of financiers warns of huge costs of failure to protect forests beyond Kyoto »
[4] Voir le rapport Stern : http://webarchive.nationalarchives....
[5] REDD est l’acronyme de Réduction des Emissions liées à la Déforestation et à la Dégradation des Forêts. Pour en savoir plus, voir : http://www.amisdelaterre.org/-Les-f...
[6] Voir le rapport des Amis de la Terre Europe « European financing of agrofuel production in Latin America » http://www.foeeurope.org/agrofuels/...
[7] http://www.amisdelaterre.org/Nouvea...
[8] Voir par exemple le reportage de France 5 sur l’impact des projets de compensation carbone sur les communautés en Ouganda : http://www.amisdelaterre.org/Le-pie... ou le site http://www.redd-monitor.org/