Pourquoi ce blog ?

Nous refusons de croire ce que nous savons…

La compensation carbone des voyages pose les questions de la durabilité des modèles du tourisme d’aujourd’hui :

> Peut-on réduire la quadrature du cercle, celle d'un nombre croissant de voyageurs en avion, d'un stock fini de pétrole, et d'une technologie encore inexistante, même embryonnaire, pour faire voler des avions avec autre chose que du kérosène ?
> La compensation pratiquée à ce jour induit-elle une nouvelle forme de colonialisme ?
> Quelle spéculation lègue t-elle aux générations futures ?

De vraies questions qui appellent de vraies solutions. Le tourisme, et pas seulement le transport aérien, devront subir, ou organiser leurs mutations.

Ces questions sont à peine abordées, en général, dans les articles consacrés au sujet.
Vous en trouverez sur ce blog une sélection, pour vous faire votre propre idée.

Voyageur, si ces propos te dépriment, tu peux te balader sur mes diaporamas ci-dessous...

jeudi 18 novembre 2010

Un voyagiste britannique renonce au système de compensation des émissions de carbone

Un voyagiste britannique renonce au système de compensation proposé à ses clients pour « effacer » les émissions de carbone liées à leurs voyages. Le débat est ouvert.

Voilà qui ne surprendra peut-être pas grand monde: la compensation volontaire du gaz carbonique émis quand on voyage ne sert pas à grand chose, en tous cas pas à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le constat est d’autant plus parlant qu’il est signé du britannique Responsible Travel, un des premiers voyagistes à avoir proposé à ses clients, dès 2002, de compenser leurs vacances, sur la base d’un montant calculé en fonction du poids en carbone de chaque voyage. Histoire d’enfoncer le clou et d’être cohérent, Responsible Travel a donc abandonné ce mécanisme. L’entreprise propose à ses clients de moins utiliser l’avion et leur demande de voyager plus près, en utilisant le train dans la mesure du possible.


Les mécanismes de compensation carbone étaient perçus par de nombreuses organisations écologistes comme un outil qui permettait aux consommateurs de toujours plus recourir à l’avion, en se donnant bonne conscience. L’argent récolté étant —en principe— investi dans des projets de production d’énergies nouvelles dans les pays en développement. Pour les responsables du voyagiste britannique, la « compensation carbone » ne permet pas de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pire, selon RT, son existence même empêche les consommateurs de modifier leur mode de vie.

On pourrait ajouter aussi que les Etats disposent d’un formidable outil qui serait bien plus efficace pour inciter le consommateur à moins prendre l’avion: car le kérosène échappe encore à toute taxe: pas de TVA, de TIPP et autre taxe carbone. rien, zéro prélèvement. En dépit de quelques timides tentatives de l’UE de changer cette situation, les Etats-Unis se refusent même d’engager la discussion. La seule taxe (hormis le prélèvement fait par les aéroports) est la fameuse « taxe de solidarité sida » récoltée par une poignée de pays et qui, si j’ai bien compris, rapporte des clopinettes… (1)

Il y a deux ans, Borloo avait reconnu publiquement que le maintien de vols intérieurs Paris-Lyon ou Paris-Marseille est une absurdité, à l’ère du TGV. Et pourtant, les avions décollent toujours!

(1) Selon UNITAID, qui récolte cette petite manne, seuls huit pays ont adopté le système de taxe sur les billets d’avions proposé par Chirac: Chili, Côte d’Ivoire,RDC, France, Madagascar, Maurice, Niger et Corée du sud.

© Denis Delbecq posté le 29 nov 2009 sur son blog http://effetsdeterre.fr

vendredi 12 novembre 2010

Polémique sur les crédits-carbone chinois

Un article publié par Novethic

La Chine est une nouvelle fois pointée du doigt pour avoir détourné le mécanisme des crédits carbone mis en place par l'ONU dans le cadre du protocole de Kyoto. Plusieurs sociétés chinoises font actuellement l'objet d'une enquête. Une affaire qui tombe mal à un mois du sommet de Cancun.

Dix entreprises asiatiques font actuellement l’objet d’une enquête. Elles sont soupçonnées d’avoir détourné à leur profit le mécanisme des crédits carbone.


C’est l’ONG allemande CDM Watch qui avait révélé la première ce scandale en juillet dernier. Il aura fallu trois mois aux Nations unies pour se saisir de l’affaire et diligenter une enquête. Une information confirmée par l’ONU lors du sommet de Tianjin sur l’environnement au début du mois.

Selon CDM Watch, il s’agit d’une escroquerie portant sur « plusieurs milliards de dollars » : l’élimination d'un gaz « à effet de serre très puissant » et rare, le HFC-23. Ce gaz est tellement valorisé qu'il devient en effet rentable de le fabriquer simplement pour le détruire. C’est ce que ferait l’entreprise chinoise Dongyue, un fabriquant de produit chimique installé dans le Shangdong, dans l’Est de la Chine. Selon un journaliste Hongkongais, Eric Ng, du quotidien South China Morning Post, Dongyue produirait volontairement des surplus de HFC-23 pour mieux le détruire et obtenir des crédits carbones revendus ensuite à des entreprises européennes et américaines. Eric Ng affirme s’être rendu sur place au mois d’octobre et avoir constaté la dérive de visu.

Enquête de l'ONU

Des experts mandatés par l’ONU sont actuellement en train d’enquêter sur le cas de Dongyue, mais pas seulement. Au total, dix entreprises asiatiques sont dans le collimateur, dont sept Chinoises, deux Sud-coréennes et une Indienne. Toutes ont profité du MDP en produisant puis détruisant le gaz HFC-23.

Ce gaz est aussi connu sous le nom de fluoroform . Il est 11 700 fois plus nocif que le CO2, et les infrastructures industrielles de captage et de destruction sont rapidement devenues le premier vecteur de MDP dans le monde. On estime ainsi que la moitié du milliard de tonnes d'équivalent CO2 économisé grâce aux MDP entre 2004 et 2012 proviendra de la destruction du HFC-23. Un effet d’aubaine pour de nombreuses entreprises. Le prix payé pour la destruction du gaz serait en effet jusqu'à 70 fois supérieur au coût réel de l'opération, relève ainsi CDM Watch. Interrogé, le groupe Dongyue a démenti ces accusations et attend le résultat de l’enquête onusienne. Mais il y a fort à parier que rien ne sortira avant le sommet de Cancun.

On comprend mieux dès lors la bataille qui se joue en coulisses sur ces dossiers et notamment l’acharnement de la Chine à défendre ce système des crédits carbone. Le groupe Dongyue affiche des revenus annuels de 400 millions d’euros et on le sait proche des pouvoirs politiques chinois. Par ailleurs, la Chine est en train de se lancer sur le marché du trading de crédits carbone et vient d’inaugurer à Tianjin justement sa première plateforme d’achats et de ventes de crédits. Une bourse du CO2 qui sera suivie par deux autres en Chine d’ici 2012. Un commerce lucratif dans lequel la Chine entend jouer les premiers rôles. Ce scandale, s’il est avéré, s’ajoute à celui révélé au moment du sommet de Copenhague. A l’époque, les Nations unies avaient refusé d'intégrer une dizaine de projets de parcs éoliens chinois aux mécanismes de développement propre. L'institution soupçonnaient la Chine d'avoir manipulé certains prix pour apparaître compétitifs et bénéficier de subsides internationaux.

Premier émetteur mondial de CO2, la Chine a en effet très tôt compris les avantages de ce mécanisme qui lui permet de faire financer, une partie de ses programmes de constructions de barrages hydroélectriques, de fermes éoliennes ou de destruction de gaz polluants par les pays développés. Actuellement, la Chine ne pèse que 3 à 4 milliards de dollars sur un marché total des crédits carbone de 126 milliards. Mais c’est elle qui remporte actuellement près de la moitié de l'ensemble des crédits venus des pays développés. L'Afrique, elle, n'en touche que 2 %.

Stéphane Pambrun à Pekin

Mis en ligne sur Novethic le : 02/11/2010